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Ancien député RPR puis UMP, désormais président de Démocratie directe pour la France Christian Vanneste invite les candidats à la présidence de la République à repenser en profondeur nos institutions. Il propose ni plus ni moins l’introduction de la démocratie directe dans notre Constitution pour rendre le pouvoir au peuple. Entretien.

En quoi nos institutions souffrent-elles d’une «  dérive » qui nuirait à leur légitimité démocratique, ainsi que vous le dites dans votre proposition ?

La France a un tropisme monarchique que le fondateur de la Vème République a intégré dans le renouveau de nos institutions après une longue et désastreuse période de régime parlementaire. Toutefois il a inscrit aussi dans le texte constitutionnel deux soucis majeurs : la souveraineté populaire qu’il appelait notre « Cour suprême », et un certain équilibre des deux pouvoirs, exécutif et législatif, le premier l’emportant certes sur le second, mais non d’une manière absolue, puisque la motion de censure et la dissolution permettent une balance à l’issue de laquelle c’est le peuple qui tranche. De même, le pouvoir exécutif sépare le Président et le Gouvernement : le premier s’occupe du long terme et le second du quotidien. Le Premier conserve et assure la continuité de la nation. Le second détermine les orientations politiques. Le premier tient sa légitimité directement du peuple, le second doit la tirer d’une majorité parlementaire.

À partir de là, plusieurs interprétations étaient possibles : soit le Président « gouvernait », soit il admettait une certaine latitude dans les choix gouvernementaux en se réservant un domaine propre, soit enfin il acceptait la cohabitation avec un gouvernement issu d’une majorité différente de la sienne. Pour remédier au flottement des cohabitations et à leur issue fatale pour le gouvernement, on a instauré le quinquennat qui fait jusqu’à présent de l’Assemblée nationale élue dans la foulée de l’élection présidentielle une chambre d’enregistrement. L’équilibre a disparu, comme a disparu l’appel au référendum.

Nous condamnons donc le quinquennat pendant lequel un individu, même élu dans des circonstances douteuses comme en 2017, jouit pendant cinq ans d’un pouvoir absolu. Le retour à l’équilibre salutaire ne peut passer que par l’introduction de la démocratie directe dans nos institutions. Le peuple pourrait alors rappeler le monarque à l’ordre en contestant les choix de son gouvernement ou en en proposant d’autres. Nous n’avons pas toutefois souhaité l’introduction du « recall »  américain qui affaiblirait par trop la fonction présidentielle.

Quelles seraient les modalités du passage à la démocratie directes, et quels en seraient avantages ? Quelles différences avec le référendum d’initiative partagée déjà existant dans la Constitution ?

Notre proposition n’évoque en rien un référendum d’initiative partagée comme celui laborieusement et lentement intégré dans nos textes après la réforme constitutionnelle de 2008. Ce n’est pas tant le nombre des signataires de la pétition initiale qui pose problème que le maintien de limites étroites dans les sujets ouverts à l’initiative et plus encore l’étonnant partage entre le peuple et le parlement qui permet à ce dernier de bloquer le scrutin demandé par un nombre suffisant d’électeurs dès lors qu’un débat parlementaire aura été organisé.

Nous condamnons donc le quinquennat pendant lequel un individu, même élu dans des circonstances douteuses comme en 2017, jouit pendant cinq ans d’un pouvoir absolu

Il s’agit bien dans notre projet d’un appel à la démocratie directe : dès lors que la pétition a rassemblé le nombre de signataires requis, l’exécutif doit organiser ce que les Suisses appellent la « votation ». Et lorsque celle-ci a eu lieu, le choix populaire doit être mis en œuvre. Par ailleurs, désormais l’application des textes votés par le Parlement devra subir un délai afin que le veto populaire puisse éventuellement s’exprimer. Enfin, dans le cas des propositions de loi populaires, il sera possible au Parlement de formuler une contre-proposition qui ne partagera nullement le pouvoir du peuple : c’est lui qui décidera alors non plus en rejetant ou en approuvant le texte issu de l’initiative populaire, mais en choisissant entre ce dernier et celui du Parlement.

L’avantage procuré par cette réforme constitutionnelle sera considérable : d’abord elle mettra un terme à la triple dérive autocratique, technocratique, oligarchique qui fait de la France une non-démocratie où un seul dirige appuyé sur une caste d’où il est issu et qui décide de tout en raison de sa présence dans les pouvoirs politiques, économiques et médiatiques. Les institutions européennes ont accentué cette dérive en accompagnant cette aliénation de la souveraineté populaire.

Notre projet consiste donc essentiellement à rétablir l’article 3 de notre Constitution qui implique la souveraineté du peuple et le recours au référendum qui en est inséparable. Le fait que le microcosme qui règne dans la plupart des démocraties occidentales et singulièrement en France ait fait du « populisme » un mot péjoratif, insultant, et non éloigné de « fascisme » pour certains, en dit long sur le déclin et la décadence de nos démocraties. Il s’agit de rétablir la démocratie réelle !

Vous proposez aussi de modifier l’article 72 de la Constitution, relatif à l’organisation des collectivités territoriales. Quels changements cela impliquerait-il localement ?

Le référendum décisionnel local est certes inscrit dans nos textes depuis 2003, mais il procède des élus et non des électeurs. Dans la logique de notre projet, nous souhaitons que là aussi l’initiative soit populaire, c’est-à-dire que dans les limites définissant l’objet de la consultation un nombre suffisant de signataires d’une pétition demandant un référendum entraîne d’abord l’organisation de celui-ci et la mise en application de la volonté exprimée par la majorité requise des électeurs.

Source : lincorrect.org, publié le 6 avril 2022 par Alexandre de Galzain.